Indiana, le changement c'est maintenant !

Indiana, le changement c'est maintenant !

Indiana Pacers - Paul George - Monta Ellis - Roy Hibbert - Larry Bird

Après avoir misé sur la continuité lors des dernières années, les Pacers ont décidé de changer radicalement de cap. La franchise du Midwest tente un coup de poker en se risquant à une conversion périlleuse, l'attaque à tout prix.

7 défaites sur 8 finales de Conférence. Tel est le palmarès des Indiana Pacers au cours de ces vingt dernières années. Ce bilan est loin d'être honteux mais cette réputation de "beaux perdants" colle trop souvent à la peau de la franchise. "Ils ont frôlé l'exploit", "ils les ont poussés dans leurs derniers retranchements", combien de fois a-t-on entendu ces expressions ces dernières années lors des Finales de la Conférence Est ? Le diable est dans les détails, disait Nietzsche. Dès lors, les Pacers avaient juste à effectuer quelques ajustements durant cette intersaison pour réaliser le rêve de ses fans inconditionnels. Mais queneni ! Le grand chef Larry Bird a décidé de tout détruire et de réinventer complètement sa franchise.

 

  • Un changement nécessaire ?

 

Les Pacers ont du coeur et de l'envie. Ils nous l'ont montré tout au long de la saison écoulée. Blue collar, gold swagger, besogneux et orgueilleux, telle est d'ailleurs leur devise. La franchise est une équipe généreuse et bagarreuse marquée par un style rugueux et une défense de fer. Malgré des blessures à répétition (Paul George, George Hill, David West, Roy Hibbert...), les Pacers ont raté de peu les playoffs cette saison avec 38 victoires pour 44 défaites, soit seulement deux succès de moins que les Celtics septièmes mais autant que les Brooklyn Nets, huitièmes. Avec le retour de son All-Star Paul George en 2015-2016 et quelques retouches, Indiana aurait pu retrouver le haut de tableau grâce à son identité qui lui est propre. Aurait pu... Car Larry Bird en a décidé autrement. Lassé que son équipe soit le "Poulidor" de la Conférence Est, il a saisi le taureau par les cornes et pris un virage à 90 degrés. Contrairement au cycliste Raymond Poulidor, éternel second, Larry Bird n'est pas fataliste et ne veut pas laisser le destin suivre son cours. Il affirme son libre-arbitre aux risques et périls de sa franchise du Midwest.

 

 

"Pace", tel est le maître mot actuellement en NBA et surtout à Indianapolis comme l'indique le nom de sa francise des Pacers. L'Indiana est un état avec une forte culture équestre. Les courses de trot "Pace" font partie de son patrimoine historique, d'où la référence aux chevaux trotteurs les "Pacers". Cette intersaison, l'équipe du Midwest a décidé de changer de "pace", de rythme comme on dit dans le basket : fini les robustes chevaux laboureurs au rythme lent, bienvenus aux chevaux de course !   


Le 17 avril dernier, le front-office d'Indiana l'avait annoncé : ils joueront plus vite. Dès lors, toute la free agency des Pacers s'articule autour de ce leitmotiv. Le risque est grand mais Larry Bird reste cohérent et fidèle à ses propos et à la nouvelle identité proposée. 

 

J'ai eu le sentiment que nous devions courir plus. Je pense qu'avec le groupe que nous avons mis en place cet été, nous allons être capable de mettre du rythme des deux côtés du terrain. Nous nous sommes renforcés avec des joueurs d'expérience, complémentaires et motivés. Je serai vraiment très déçu si nous n'allons pas en playoffs. Je pense que nous avons le talent pour jouer un véritable rôle dans la conférence Est.

 

  • Une free agency mouvementée

 

Bien qu'intimidante et très solide, la paire Hibbert-West, clé de voûte du système des Pacers, a échoué lors des trois dernières saisons à faire passer un cap offensif à cette équipe. Indiana a fini au mieux 19ème au niveau de l'efficacité offensive. Certes, l'absence de Paul George la saison passée est à prendre en compte mais il n'en demeure pas moins que le système offensif des Pacers reste fébrile. Dès lors, un changement s'impose. Voyant sa franchise arriver en bout de cycle, Larry Bird l'a compris, il faut faire le ménage. S'il avait pu juste effectuer quelques modifications en recrutant et tradant quelques joueurs, Larry a préféré, comme à son habitude, ne rien faire dans la dentelle. Il compte même entièrement revoir son système, d'après l'analyste du média Grantland, Brett Koremenos :

 

"C'est toujours réjouissant pour un spécialiste de basket d'étudier la (re)construction d'une équipe en NBA. Actuellement, il est fascinant d'observer une franchise comme Indiana qui s'insère dans une nouvelle tendance. Quelques équipes avouent que de simples ajouts de joueurs peuvent combler l'écart entre leur style de jeu et la tendance vers laquelle la NBA se déplace toute entière. La transition soudaine des Pacers n'est rien d'autre qu'un changement extrême.. Une réaction instinctive et prématurée ? Une clairvoyance brillante ? Seul l'avenir nous le dira.

 

L'intersaison des Pacers est pour l'instant marquée par la perte de ses intérieurs. Si le départ de Roy Hibbert semblait inévitable, les pertes de David West parti aux San Antonio Spurs et de Luis Scola aux Toronto Raptors laissent quant à elles un vide au poste 4. En perdant la plupart de ses intérieurs, Indiana fait une croix sur 31,6 points, 20,5 rebonds et plus de 2 contres par match. Pour remplacer ses Big Men, la franchise du Midwest a misé sur Jordan Hill et Myles Turner. Cette frontline est certes moins impressionnante que la paire Hibbert-West mais elle correspond plus au style de jeu prôné par Larry Bird. 8ème choix de la draft en 2009, Jordan Hill est, en plus d'être un très bon rebondeur avec 7,2 rebonds par match pour 22 minutes de jeu en trois saisons aux Lakers, un intérieur mobile et explosif ayant évolué sous les ordres du roi du jeu rapide, Mike D'Antoni. Mais la véritable bonne pioche des Pacers peut être le rookie drafté en 11ème position Myles Turner. Auteur d'une Summer League dantesque -18,7 points, 8,3 rebonds et plus de 2 contres par match !-, Indiana semble encore avoir eu le nez fin lors de cette draft 2015. Rapide, athlétique, capable de shooter à 3 points et gros contreur, il apparaît comme un "Roy Hibbert amélioré" tout en collant à la nouvelle philosophie des Pacers. 

 

Le départ du géant jamaïcain semble combler mais les pertes de David West et de Luis Scola paraissent plus préjudiciables. En effet, les Pacers n'ont plus d'ailier-fort naturel au sein de leur effectif à présent. L'idée de Bird et Vogel est claire là encore : faire jouer Paul George en poste 4. Cela permettrait de donner un tout autre visage à la franchise en utilisant un maximum le spacing -jeu très écarté avec cinq joueurs très athlétiques sans réels postes fixes-, et en ne jouant plus avec deux intérieurs traditionnels. C'est encore une fois un pari risqué de Maître Bird qui reste convaincu des bienfaits de ce repositionnement. 

 

Outre le départ de C.J Watson à Orlando et l'arrivée de Chase Budinger en échange de Damjan Rudez​, la free agency des Pacers est marquée par l'arrivé du scoreur Monta Ellis en provenance de Dallas. L'arrière de 29 ans apporte à Indy ce qui lui manquait cruellement, à savoir un scoreur capable d'amener sa folie. Trop souvent sous-estimé, Monta Ellis est tout de même le troisième meilleur marqueur sur pick-and-roll​ dans la Ligue (7,6 points par match), derrière Chris Paul et Damian Lillard. Dans cette nouvelle équipe portée sur un jeu rapide et en transition dit up-tempo, il pourra entièrement s'épanouir d'autant plus que les Pacers offre un système défensif solidaire, capable de combler ses lacunes défensives. George Hill se chargera de défendre sur les arrières les plus coriaces pour laisser souffler son nouveau coéquipier. Aux côtés du feu follet et de ses 20 points de moyenne par match, on note la re-signature de Rodney Stuckey pour 3 ans. Il permettra à Indiana de compter dans ses rangs un autre joueur d'expérience capable de courir et d'offrir une réussite solide au tir à mi-distance (40%). 

 

  • Une réelle perte d'identité ?

 

Après des années dévouées à jouer un basket rugueux et traditionnel basé sur une raquette solide et un jeu sur demi-terrain, les Pacers sont appelés par Larry Bird à jouer un jeu plus rapide basé sur un système up-tempo. Mais soyons clair, Indiana ne va pas du jour au lendemain tenter d'imiter la version "run and gun" des Phoenix Suns de Mike d'Antoni. Les traditions ont la dent dure dans le Midwest et la défense occupera une part encore fondamentale dans l'ADN même des Pacers. À cet égard, la déclaration de Myles Turner, le rookie drafté en 11ème position est révélatrice. A la question qui lui a été posée concernant les aspects de son jeu qu'il va devoir améliorer, il répond:

"Je pense que je dois progresser dans tous les domaines mais la priorité est de travailler ma défense et mon intimidation dans la raquette. (...) La culture de l'équipe veut que l'on ait un pivot intimidant et qui soit "l'ancre" de la raquette".

 

Les Pacers effectuent un changement notable mais ne comptent pas perdre non plus leur identité. Indiana suit donc cette nouvelle tendance en NBA qui voit l'avènement du small ball et d'un jeu plus rapide. Jusqu'à présent ce système semblait voué à l'échec mais le savant mélange des Golden State Warriors a peut-être ouvert une nouvelle ère : un jeu rapide à souhait et une défense solide. Voilà ce à quoi aspire les Pacers. Néanmoins ce changement soudain est-il nécessaire pour Indiana ?