Les Suns sont en playoffs : Une première (émouvante) depuis 2010

Les Suns sont en playoffs : Une première (émouvante) depuis 2010

Phoenix Suns - Devin Booker - Chris Paul - Monty Williams
Crédit photo : ESPN

Incroyable mais vrai ! Après 11 ans de disette, les Phoenix Suns ont enfin validé leur ticket pour les playoffs 2021 la nuit dernière en battant les Clippers. Ils mettent fin à la seconde plus grande traversée du désert de la ligue, laissant les Sacramento Kings bien seuls dans leur malheur.

C’est fait ! La délivrance est arrivée la nuit dernière pour les fans des Suns. Après 11 ans de tristesse, colère et humiliation, les Suns vont cette saison retrouver les playoffs, l’heure de tourner la page d’une décennie noire est belle et bien venue. On savait depuis de nombreuses semaines que les Suns seraient à n’en pas douter au rendez-vous de la post-season, mais l’officialisation de la nouvelle au terme d’une 44ème victoire cette saison a fait l’effet d’une bombe. Numériquement parlant, les joueurs de Phoenix ne pourront plus être rattrapés par le 7ème de la conférence Ouest, obligé de passer par un play-in.

 

Alors cette victoire contre les Clippers (109-101) est intervenue comme un formidable symbole de tout ce qu’ont pu vivre les Suns depuis 11 ans. 11 ans de galère jusqu’à cette nuit, et cette nouvelle victoire contre un prétendant au titre NBA qui est venue assoir encore un peu plus leur domination sur la ligue. Irréel, comme l’ambiance dans la salle de Downtown Phoenix où les 3000 fans, restrictions sanitaires oblige, ont pu acclamer bien fort leurs héros, ceux qui viennent de mettre un terme à leur cauchemar. En conférence de presse, Monty Williams a décrit l’ambiance du soir comme la plus ‘’électrique’’ qu’il ait entendu cette saison. Un bonheur fou, surtout après 14 mois sous Covid, dans un pays américain qui commence à voir la lumière au bout du tunnel, celle des salles pleines.

 

 

Il faut bien avouer que cette qualification en playoffs arrive au terme d’innombrables péripéties tragi-comiques, vécues comme un fardeau à Phoenix lors des 11 dernières années. Après le départ de Steve Nash, la chute a été encore plus violente qu’attendue. Très vite, la médiocrité s’est installée avec une première saison à 25 victoires, pire bilan depuis la première saison de la franchise en 1968, annonçait la couleur. Quelques rayons de soleils sont certes venus irriguer cette traversée aride. La période 2013-2015 fut belle, bien que cruelle, où les Suns emmenés par Goran Dragic mais surtout un groupe très complet et soudé ont atteint 48 victoires, puis 39 victoires, sans jamais accrocher les playoffs la faute à une conférence Ouest toujouts très densément compétitive. Un mal pour un bien finalement, puisque c’est après cette seconde saison frustrante (2014-2015), que les Suns sélectionnent sans trop de convictions un certain Devin Booker, 6ème homme à Kentucky, en 13ème choix de la Draft 2015.

 

Le début du bonheur me direz-vous ? Pas tout à fait. Bien au contraire, c’est dans les premières années du règne de Booker I que les saisons les plus dramatiques de l’histoire de la franchise vont intervenir. Lors des 4 saisons qui suivent : les frères Morris vont déclencher bagarre sur bagarre (sur le terrain comme en dehors), Eric Bledsoe va clamer haut et fort son célèbre ‘’I don’t wanna be here’’ chez son coiffeur favori, et Ryan McDonough, fin gourmet sur Devin Booker, va enchaîner les mauvais choix de Draft, de Dragan Bender à Marquese Chriss en passant par Josh Jackson. Une overdose (vous l’avez ?) de mauvais résultats en série va clouer les Suns à la dernière place de la conférence Ouest saison après saison, sans jamais dépasser les 24 victoires. Devin Booker sera déjà la seule éclaircie sur le tableau nwaar, comme lors de cette fameuse nuit où dans un TD Garden acquis à sa cause, il marque 70 points. Pourtant, tout ce qui sera retenu de cette performance sera celle d’un perdant magnifique, un borgne au pays des aveugles bref, un respect inaccordable.

 

C’est alors en 2018, lors de l’arrivée de James Jones au poste de General Manager que tout va réellement changer. Bien aidé par la sélection de Deandre Ayton et Mikal Bridges lors de la Draft 2018, joli cadeau de bienvenue signé McDonough, que le GM toujours bagué en compagnie de LeBron James va instaurer une nouvelle culture à Phoenix, celle de la gagne. Il va concentrer tous ses choix non plus sur le potentiel, mais sur la qualité de ses recrues. Un choix audacieux et payant. Dès ses premiers mois en poste, il récupère à Washington Kelly Oubre Jr, première pierre du retour au sommet des Suns. Lors de l’intersaison qui suit, il accompagne ces jeunes Suns de vétérans accomplis (Ricky Rubio et Aron Baynes) et du mieux sera immédiatement aperçu. Après une saison perturbée par le Covid, le shoot manqué par Caris LeVert contre les Blazers au terme de la saison régulière dans la bulle d’Orlando va priver les Suns de play-in. Une équipe qui avait réussi un 8-0 impensable, mais pas récompensé, une fois n’est pas coutume. Alors la nuit dernière, quand les Suns se sont enfin qualifiés pour les Playoffs, le jeune prince devenu roi avait toutes les raisons du monde d’afficher son plus beau sourire et ce, à quelqu’un d’autre que sa très médiatisée reine, Kendall Jenner.

 

 

C’est un sentiment génial. Vraiment. Comme vous le savez ça faisait longtemps que j’attendais ça. J’ai juste fermé ma gueule pendant 5 ans, Coach Monty m’a préparé pour cette opportunité, et c’est la situation dans laquelle on est maintenant. Je l’ai toujours dit, je ne veux pas regarder en arrière, je ne veux pas revenir sur tout ce que j’ai dû subir ici, mais je voulais simplement changer ma destinée pour quoi que ce soit de meilleur. Je dis toujours que le Basket et la vie sont liés, j’ai grandi avec le Basket dans tous les moments par lesquels je suis passé, et je vois le bon côté des choses aujourd’hui. J’ai gardé la tête basse, et j’ai continué à travailler.

 

Cette déclaration pleine d’humilité de Devin Booker, très profond dans ses pensées, en dit long sur tout ce qu’il a en effet pu vivre à Phoenix. Il y a connu le pire, et il y est resté pour le meilleur. Une belle leçon de vie, inspirante, qui fait écho dans le cœur de chacun des fans des Suns en ce jour presque sacré de retour en playoffs. Ces 11 années ont surtout été l’histoire de femmes et hommes mangeant leur pain noir, attendant patiemment la renaissance. Elle arrive aujourd’hui, et la délivrance visible sur les réseaux sociaux de l’Arizona depuis 6 heures du matin est belle à voir. Certains partagent leur souvenir, publiant des photos d’eux 11 ans auparavant, constatant comme le temps passe vite, là où d’autres savourent l’instant, crient leur joie, et vénèrent leurs idoles. Parmi eux, on ne peut évidemment pas passer à côté du Point God, Chris Paul, l’élément suprême qu’il manquait à la réussite des Suns, l’homme qui a déclenché le déclic du haut de ses 35 ans et qui pourrait bien discrètement s’inviter dans la course au MVP, en bon père de famille.

 

 

Ce groupe de joueurs que nous avons est une équipe spéciale. Je donne à James Jones beaucoup de crédit pour m’avoir fait confiance à moi, un type de 35 ans que tout le monde disait cramé il y a quelques années ! C’est cool, je me connais, j’ai travaillé dur et c’est la seule chose à faire quand on est un compétiteur. On doit toujours parier sur soi-même comme le disent toujours Fred VanVleet ou Isaiah Thomas. Tout se joue dans le travail que tu produis quand les gens ne te voient pas. Je suis reconnaissant d’avoir une équipe aussi incroyable autour de moi, qui me supporte comme personne d’autre. Monty Williams est plus qu’un ‘’player coach’’, il est de ma famille, on a vécu beaucoup de choses ensemble et c’est très rare de rencontrer des gens comme lui dans la vie. Je suis aussi content pour Devin Booker, car il le mérite. Quand on est dans cette ligue, parfois les fans ne savent pas apprécier la grandeur d’un joueur, Devin l’a été tous les soirs depuis ses débuts, et je suis content que le monde puisse enfin s’en rendre compte. Notre équipe ne serait pas la même sans lui et sa volonté de se battre tous les jours.

 

La famille, c’est d’ailleurs comme ça que Chris Paul nomme ses coéquipiers. Il y a quelques jours, toujours en conférence de presse, le meneur vétéran expliquait de façon touchante qu’il doit vivre à Phoenix sans sa famille depuis 1 an, éloigné de sa femme et ses enfants. Ainsi, il a donc décidé de consacrer tout son temps à sa famille sportive, et ce en commençant par Mikal Bridges et Jevon Carter qu’il n’hésite pas à désigner comme ses enfants ! Car c’est ça la réalité de nos hôpitaux, de tout le succès acquis à Phoenix cette saison. Ces Suns, c’est l’histoire d’une famille unie, dont certains membres ont connu les pires traumatismes, liée pour aller chercher un objectif presque inavouable, celui d’obtenir le premier titre de champion NBA dans l’histoire de la franchise. Les playoffs seront une tout autre histoire à inscrire dans le livret de famille. En attendant, les Suns peuvent s’élever encore un peu plus haut dans le ciel NBA dès Vendredi soir. S’ils battent le Jazz, ils prendront la tête de la conférence Ouest avec le meilleur bilan de la ligue, de quoi s’offrir une Fête du Travail aussi festive que dans un cortège de la CGT.