Les pépites du Hall of Fame : Les Original Celtics

Les pépites du Hall of Fame : Les Original Celtics

Original Celtics

Dans les pépites du Hall of Fame, nous partons à la découverte de personnes intronisées au panthéon du basket. Mais pas n’importe lesquelles, nous vous faisons le portrait de personnes soit peu connues de nos jours, soit ayant des histoires atypiques méritant une mise en lumière. Joueurs, équipe, entraineurs… Tous ont eu un impact sur l’évolution du basket et n’ont pas volé leur place au Hall of Fame.

A une époque où la NBA n’était pas encore apparue, le basket connaissait déjà une belle expansion aux Etats-Unis et à l’international, grâce notamment à Luther Gulick dont nous avons parlé dans le premier épisode. De nouvelles ligues se créaient et disparaissaient aussi vite que de nouvelles équipes. Parmi toutes ces équipes, l’une d’entre elles établira une telle domination qu’elle causera sa propre dissolution. Dans cet épisode des pépites du Hall of Fame, allons à la découverte des Boston Original Celtics.

 

Nous sommes en 1914. La première guerre mondiale vient d’éclater et, bien loin des combats qui se tiennent en Europe, la vie à New York suit son cours. Mais la ville américaine n’en reste pas moins en constante évolution, notamment due aux milliers d’immigrants irlandais faisant leurs valises pour gagner les Etats-Unis. Par exemple, de 1901 à 1910, ce sont presque 400 000 irlandais qui sont arrivés aux Etats-Unis, se répartissant dans les plus grandes villes comme notamment Boston, Philadelphie ou New York. Cette grande vague d’immigration, qui ne datait déjà pas d’hier, a permis de développer de fortes communautés irlandaises dans ces villes. Dans ces communautés se sont naturellement créées des petites équipes de basket par ci par là et, en 1914, une équipe a vu le jour dans les quartiers ouest de New York : les New York Celtics. Composée exclusivement d’irlandais, l’équipe est dirigée par Frank McCormack et ses joueurs venaient principalement des quartiers d’Hudson Guild et Hell’s Kitchen. L’équipe jouera jusqu’en 1917, date où les Etats-Unis entreront en guerre contre l’Allemagne et où McCormack devra rejoindre les forces armées américaines. McCormack donnera les clés de l’équipe aux frères Thomas et James Furey, mais refusera de leur vendre le nom « Celtics ». Problème pour les Furey, car ces derniers avaient de grandes ambitions pour cette équipe et, avec le manque de professionnalisation de ce sport à l’époque, le nom d’une équipe était très important pour se construire une identité et une fan base. Hors, les Celtics était le nom parfait : il était simple, représentatif de l’identité de l’équipe, et s’était déjà fait une petite réputation dans les quartiers de New York. Thomas et James ne vont pas s’embêter plus longtemps dans les discussions, ils vont décider de renommer l’équipe les Original Celtics, signer de nouveaux joueurs et ne vont garder que Pete Barry et John Witte de l’effectif ayant évolué entre 1914 et 1917.

 

 

Le succès de l’équipe sera quasi immédiat. Sur la saison 1919-1920, ils gagneront 65 de leurs 69 matchs et s’auto-proclameront champions du monde. Très vite, ils quitteront les championnats professionnels et se contenteront de voyager de ville en ville pour jouer des matchs d’exhibition. En faisant signer aux joueurs des contrats lucratifs mais permettant aux Celtics de garder l’exclusivité de leurs droits, ce qui était une nouveauté à l’époque, ils pouvaient multiplier les matchs de ce type tout en gardant des joueurs frais (ils jouaient quand même plus de 100 matchs par an), ce qui leur permettait de gagner presque tous leurs matchs. Cette tournée de matchs, qui durera à peu près deux ans, se terminera sur un incroyable bilan de 193 victoires, 11 nuls et 1 défaite. Gardant un véritable esprit de compétition malgré le fait que leurs matchs ne soient pas pour le compte d’une compétition officielle, les Celtics n’hésiteront pas à challenger les Franklin Wonder Five en 1923 après leur titre de champions universitaires, que ces derniers déclineront pour cause de fatigue. En 1925, les Celtics réintègreront les ligues professionnelles, ce qui marquera le sommet de leur gloire et, paradoxalement, le début d’une fin précipitée pour cette équipe désormais légendaire.

 

 

Les Celtics ont dans un premier temps voulu jouer pour la Metropolitan League, mais le petit nombre de matchs et de capacité des salles les a poussés à quitter cette ligue à peine la saison démarrée. Ils intègreront dans la foulée la NBL (National Basketball League), qu’ils quitteront également puisque leurs joueurs commençaient à partir pour l’ABL (American Basketball League), la première grande ligue professionnelle de basketball, qui offrait de meilleures perspectives financières. En 1926, les Celtics auront le droit de rejoindre l’ABL, mais ils refuseront pour continuer à jouer des matchs d’exhibition. Suite à cet « affront », l’ABL interdira à ses équipes de jouer des matchs d’exhibition contre les Celtics, ce qui impactera l’attention portée à cette équipe. Dans le même temps, l’équipe de Brooklyn ne gagnait pas un seul de ses matchs (0-5) en ABL, et ses dirigeants décidèrent d’arrêter les frais sportifs et financiers en se retirant de la ligue. L’ABL proposa à nouveau aux Celtics d’intégrer la ligue à la place de Brooklyn, que ces derniers accepteront cette fois-ci. Malgré ce déficit de 5 victoires d’entrée, les Celtics finiront 4èmes de la première moitié du championnat, premiers de la seconde moitié et remporteront le titre final. Lors de la saison 1927-1928, les Celtics gagneront à nouveau le titre avec un bilan de 40 victoires pour 9 défaites en saison régulière. A cause de l’ultra-domination des Celtics, le public commençait à se plaindre du manque de suspens et la ligue a tout de suite réagi en suspendant l’équipe et en la forçant à transférer ces joueurs vers les autres équipes de la ligue. Ceci sonna alors la fin des Celtics que l’on connaissait, et marqua d’ailleurs une chute dans les audiences et la fin temporaire de l’ABL au début de la Grande Dépression. L’équipe de New York tentera bien de revenir à plusieurs reprises, que ce soit pour des matchs d’exhibition ou des compétitions officielles, mais sans succès, les heures de gloire de cette équipe étaient passées.

 

 

L’impact de ces Celtics sur le basket est bien plus grand que ce que l’on pourrait l’imaginer. Dans l’effectif, il y avait notamment Nat Holman, surnommé Mr. Basketball (rien que ça) bien des années avant que ce surnom soit donné à George Mikan. Il évoluera chez les Celtics de 1921 à 1928 pour un bilan de 720 victoires pour 75 défaites (rien que ça). Holman était l’un des joueurs les plus dominants de sa génération et il sera intronisé au Hall of Fame une deuxième fois en tant que joueur en 1964. Sur cette période, il jouera avec des joueurs comme John Beckman, Dutch Dehnert et Joe Lapchick, tous les trois au Hall of Fame comme joueurs également. Ça vous classe le niveau de l’équipe durant cette période. En plus d’avoir de très bons joueurs, ces derniers pouvaient créer une réelle complicité puisque leurs contrats exclusifs leurs permettaient de toujours jouer ensemble. Il y a une histoire qui illustre très bien ceci : Dans les derniers instants d’un match serré entre les New York Celtics et le Washington Palace, Georges (Horse) Haggerty doit remettre la balle en jeu. Alors entraineur-joueur du Palace, Haggerty avait joué chez les Celtics de 1921 à 1923. Lors de cette remise en jeu, Holman aurait crié « Horse, ici !» et Haggerty aurait instinctivement donné le ballon à son ex-coéquipier, qui a alors pu mettre le panier seul sous le cercle. Impossible de dire s’il s’agit d’une histoire vraie ou d’un fait romancé par Holman, mais toujours est-il qu’elle était suffisamment crédible pour être devenue assez populaire à l’époque. Cette cohésion leur a permis de créer des concepts qui sont basiques dans le jeu actuel : l’attaque au poste avec un pivot comme pièce centrale de l’attaque, le passe-et-va, ou encore la défense en zone. Malheureusement, les vidéos de match manquent et tout ce que l’on peut retrouver de cette équipe est un reportage de 1932, soit après sa période ABL.

 

 

Cette histoire qui commence en 1914 n’a rien à voir avec celle qui commencera en 1946 à Boston, et que nous connaissons de nos jours sous le nom des Boston Celtics. Mais nul doute que si Howie McHugh a donné ce nom à la franchise, c’est aussi pour faire un clin d’œil à l’ex-équipe de New York. D’ailleurs le succès des Boston Celtics, franchise la plus titrée de NBA, va bien de paire avec ce qu’a été l’équipe de New York dans les années 1920. Equipe ultra-dominante lors des premières heures du basket, les Celtics ont réussi à faire passer un énorme cap aussi bien dans le jeu que dans l’attention prêtée par le grand public à la balle orange. L'équipe, dans sa globalité, a donc été logiquement intronisée au Hall of Fame en 1959.