Phoenix renaît de ses cendres

Phoenix renaît de ses cendres

En cette fin de saison régulière largement disputée au sein de la conférence ouest, Phoenix tente de décrocher l’une des dernières places qualificatives pour les phases finales. Classés neuvièmes suite à deux revers consécutifs, et à égalité avec Memphis (44 victoires pour 31 défaites), les Suns vivent actuellement une fin d’exercice ponctuée de multiples rebondissements. Aujourd’hui, l’unique certitude dont disposent les hommes de Jeff Hornacek est qu’ils ont déjà réussi leur saison, et ce quel que soit le dénouement final de l’histoire. Retour sur la cohérence d’un projet bien en avance…

  • UN GRAND CHAMBARDEMENT À TOUS LES NIVEAUX

Nous sommes à l’intersaison 2012, et Phoenix vit là un tournant dans son histoire récente : Steve Nash, véritable icône de la franchise depuis plus de huit ans, est envoyé à Los Angeles par le front office des Suns, en échange de nombreux tours de draft. Cet épisode marque l’avènement d’une période de transition et de reconstruction en Arizona car dans la foulée, c’est Alvin Gentry, coach et instigateur du « run and gun » à Phoenix, qui quitte un navire en perdition sur le plan sportif. En effet, celui-ci présentera à l’issue de la saison le deuxième pire bilan de l’histoire de la franchise : 25 succès contre 57 revers.

A l’aube de la saison en cours, nombreux sont ceux qui prédisent un exercice délicat pour les Suns, dans la lignée de 2012-2013. Et pour cause, la reconstruction entamée l’an passé se poursuit avec l’arrivée du jeune Ryan McDonough à la tête des opérations sportives. Exit les vieux briscards aux contrats expirants type Luis Scola, Marcin Gortat ou encore Jared Dudley. Le Grand Canyon est le théâtre d’une véritable braderie au sein de laquelle « économies » et « jeunesse » sont les seuls mots d’ordre. Eric Bledsoe, Gerald Green, Miles Plumlee et Ishmael Smith arrivent par le biais de transferts tandis que les dirigeants choisissent de sélectionner Alex Len en 5e position de la draft.

Du changement dans les hautes sphères de la franchise, un renouvellement express de l‘effectif, mais aussi un nouveau visage sur le banc de touche puisque Jeff Hornacek succède à Lindsey Hunter. Après avoir effectué ses débuts en tant que joueur sous les couleurs des Suns, celui-ci se lance dans sa carrière d’entraîneur également avec Phoenix. Réputé pour être un technicien énergique, il s’avère toutefois difficile pour lui de fixer de réels objectifs à ses joueurs tant le bouleversement semble profond.

  • UN CONTRE-PIED INATTENDU

Or dès la reprise des hostilités, Phoenix parvient à séduire tous les observateurs. Leur jeu résolument offensif est basé sur un tempo élevé ainsi qu’une transmission rapide de la gonfle. Ce style n’est évidemment pas sans rappeler l’époque du « run and gun » durant laquelle les Suns trustaient les premières places, sous l’impulsion d’éléments comme Nash, Amar’e Stoudemire ou encore Jason Richardson. Aujourd’hui, la présence combinée de Goran Dragic et Eric Bledsoe est l’ingrédient maison de la recette ayant conduit Jeff Hornacek sur la route d’un bilan positif, que ce soit dans les chiffres ou dans le contenu. A l’instar de Kevin Johnson et de ce même Hornacek qui constituaient le backcourt titulaire de Phoenix à la fin des années 80, la ligne arrière des Suns est composée de deux meneurs de jeu. L’actuel coach raconte :

« Lorsque nous avons récupéré Eric Bledsoe, je crois que personne chez nous n’a envisagé de transférer Goran. Et quand Ryan (McDonough) m’a parlé du transfert, j’ai dit qu'Eric ressemblait à Kevin Johnson, et que Goran était un peu comme moi. A l’époque, on avait transformé la franchise, passant de 28 matches gagnés en 1988 à 55 matches en 1989. »

A l’heure actuelle, Dragic (20,4 points à 51 % de réussite, 6 passes par match) et son escouade en sont à 44 succès, contre seulement 25 l’an passé. Personne n’aurait placé la franchise de l’Arizona parmi les prétendants aux playoffs et pourtant, à environ quinze jours du terme de la saison régulière, Phoenix bataille avec les Mavericks et les Grizzlies pour participer aux phases finales. Septième meilleure équipe de la ligue au scoring (105,4 points de moyenne par match), les Suns font également partie de ceux qui prennent le plus de tirs derrière la ligne à trois points (4e avec 1903 tentatives jusqu’ici pour 37,3 % de réussite).

Jouer la postseason dans de telles circonstances représenterait donc un bonus inestimable pour Phoenix, qui serait classé 3e derrière Miami et Indiana si elle évoluait dans une conférence est bien moins relevée. Tous ces chiffres font de Jeff Hornacek un prétendant au titre de Coach of the Year, aux côtés de Terry Stotts (Portland, 49-27), Steve Clifford (Charlotte, 37-38) ou encore Dwane Casey (Toronto, 43-32). Et à l’image de Doc Rivers en 2000, Rick Carlisle en 2002 et Tom Thibodeau en 2011, la NBA apprécie décerner cette distinction individuelle aux entraîneurs rookies…

  • DE JEUNES JOUEURS PLEIN DE PROMESSES

La particularité des Suns réside dans le fait que la plupart d’entre eux réalisent cette année leur meilleure saison d’un point de vue statistique. Avec un effectif exclusivement composé de jeunes éléments et de joueurs revanchards, Hornacek est parvenu à tirer le meilleur de ses hommes. A l’inverse, ceux-ci ont su profiter des opportunités offertes. Par exemple, Eric Bledsoe marque cette année 17,3 points en moyenne par match, soit environ 9 unités de plus que son ancien record personnel sur toute une saison. Le constat est identique pour Dragic (20,4 points contre 14,7), Markieff Morris (13,8 contre 8,2) ou encore Plumlee (8,3 contre 0,9).

Arrivé cet été à Phoenix en compagnie de Caron Butler, dans le cadre du transfert envoyant Dudley aux Clippers, Eric Bledsoe (24 ans) vit sa première saison dans la grande ligue en tant que titulaire indiscutable. Drafté en 18e position par Oklahoma City en 2010, il a toujours été le back-up de Baron Davis puis de Chris Paul du côté de Los Angeles. Mais son potentiel ainsi que ses prestations convaincantes en sortie de banc ont attisé les convoitises d’autres franchises à la recherche d’un meneur de jeu titulaire. Résultat, « mini-LeBron » tourne cette saison à 17,3 points (46 % de réussite), 5,6 passes et 4,6 rebonds de moyenne par match.

Son indisponibilité causée par une opération du ménisque en cours d’année n’a pas particulièrement freiné la vitesse de croisière des Suns. En effet, le revanchard et spectaculaire Gerald Green a assuré un intérim de très bonne facture (15,5 points de moyenne, 39 % de réussite à trois points). Âgé de 28 ans, l’arrière voltigeur des Suns profite de l’entière confiance de son coach pour effectuer sa meilleure saison en NBA. Ancien meilleur sixième homme de la ligue en 2007, Leandro Barbosa est quant à lui arrivé en milieu d’année pour faire le nombre en l’absence de Bledsoe.

Mais aujourd’hui, s’il y a un Sun qui peut prétendre au titre de 6th Man of the Year, c’est bien Markieff Morris. A l’âge de 24 ans, il effectue une saison pleine : 13,8 points et 6 rebonds de moyenne en 74 matches, tous démarrés depuis le banc des remplaçants. Son frère jumeau Marcus Morris n’est pas en reste avec 9,9 points et 4 rebonds par match. Toujours sur les extérieurs, Phoenix peut compter sur un autre joueur un peu plus expérimenté, à savoir PJ Tucker. Passé par la Grèce, l’Ukraine, l’Allemagne ou encore l’Italie, l’ailier de 28 ans est un excellent joueur d’équipe. Adroit derrière l’arc, bon rebondeur et dur sur l’homme, Tucker est le véritable moteur défensif des Suns, comme en témoigne cette déclaration signée Hornacek :

« Ca aide quand vous avez un joueur capable d’obliger un gros scoreur à travailler dur pour marquer ses points. On met beaucoup de pression à PJ et il fait du super bon boulot. »
  • CIEL DÉGAGÉ PRÉVU EN ARIZONA

Aujourd’hui, les Suns ont l’occasion de participer aux playoffs pour la première fois depuis 2010 et une finale de conférence perdue 4-2 face aux Lakers de Kobe Bryant. Il serait intéressant pour les hommes d’Hornacek d’atteindre cet objectif - impensable en début de saison - afin d’emmagasiner un maximum d’expérience et de vécu collectif pour revenir encore plus forts dès l’année prochaine. Quoi qu’il en soit, les fans des Suns, toujours orphelins d’un certain Steve Nash, peuvent rêver à des jours meilleurs. Car Phoenix est en avance sur son projet de reconstruction et le jeu attrayant instauré par Jeff Hornacek comme la jeunesse et le talent de l’effectif en place sont annonciateurs d’un avenir radieux.

Depuis son arrivée au sein du front office de la franchise, Ryan McDonough a effectué un travail remarquable. Son plus joli coup aura été d’échanger avec Washington le contrat expirant de Marcin Gortat contre Emeka Okafor mais surtout un choix de draft protégé et relativement élevé lors de la prochaine loterie. Avec de l’espace disponible sous le salary cap, il ne lui manque plus qu’à ne pas se tromper lors de la draft à venir afin d’avoir tous les éléments à disposition pour faire à nouveau de Phoenix un sérieux poil à gratter de la conférence ouest.