Les Grizzlies en voie d'extinction ?

Les Grizzlies en voie d'extinction ?

Memphis Grizzlies - Marc Gasol - Zach Randolph - Mike Conley - Matt Barnes - Free Agency

Dans une division Southwest qui a animé toute la Free Agency, les Memphis Grizzlies misent sur la continuité en s'entêtant dans un schéma de jeu qui leur est propre : la défense à tout prix.

"Offense wins games, Defense wins championships", "l'attaque fait gagner des matchs, la défense, des titres". Voilà cinq ans que cet adage anime les Grizzlies, cinq ans que la franchise du Tennesse tente d'appliquer à la lettre ce slogan pour atteindre les Finales NBA. Et cela n'est pas prêt de changer. L'entraîneur Dave Joerger plante d'ailleurs très bien le décor pour la saison prochaine :

 

On aimerait bien rejoindre cette tendance NBA actuelle, courir un peu plus souvent en attaque, être plus rapide pour obtenir des paniers faciles, mais on ne jouera jamais à une vitesse incroyable, rien qu'en voyant la façon dont notre effectif est construit.

 

Pas de surprise donc dans le Tennesse : les Grizzlies sortiront les griffes en défense et hiberneront en attaque.

 

  • Memphis, c'est du solide

 

Tout comme les Spurs de San Antonio, Memphis a réussi pour une troisième année consécutive à se classer dans le Top 5 du classement ESPN des meilleures franchises issues des quatre sports majeurs (MLB, NBA, NFL, NHL), l'Ultimate Standings. Outre le plan sportif, ce classement prend en compte de nombreux critères tels que la relation avec les fans, l'expérience au stade, l'accessibilité etc.. Loin des fastes de Los Angeles, des rebondissements de Sacramento et de la dynastie de San Antonio, les Grizzlies font, d'une démarche pataude, leur bout de chemin en toute discrétion. 

Voici cinq années consécutives que Memphis se qualifie en playoffs. Rien de bien extraordinaire me diriez-vous, mais dans une conférence Ouest de plus en plus relevée, Memphis y tient la dragée haute. Pour preuve ces trois dernières années, la franchise du Tennessee a achevé chaque saison régulière avec au moins 50 victoires. À l'heure des playoffs, les Grizzlies rugissent encore et réalisent même des exploits en sortant notamment au premier tour des Spurs ultra-favoris en 2011, ou encore en balayant le Thunder d'Oklahoma 4-1 en demi-finales de Conférence en 2013. Durs à apprivoiser, les Grizzlies rendent toujours les armes après des batailles épiques.

 

Véritable anomalie au sein de la Conférence Ouest, le fonds de commerce de Memphis s'appuie sur une mentalité défensive exacerbée. En effet, le "succès" de ce petit marché repose principalement sur son identité assumée et revendiquée par son slogan "All heart, Grit and Grind ", "Du cœur, du courage, de l'envie". À l'image de la ville de Memphis, les Grizzlies sont loin d'être glamour ou clinquants, mais ils sont déterminés et jouent avec leurs coeurs et leurs tripes comme le mentionne leur devise. Ainsi depuis la saison 2011-2012, Memphis est présent dans le top 5 des meilleures défenses de la Ligue. L'année dernière, la franchise du Tennessee encaissait seulement 95,1 points par match, soit la deuxième meilleure défense de toute la NBA. À l'instar des grands prédateurs, les Grizzlies sont tenaces et défendent leur tanière becs et ongles devant les fans déchaînés du FedEx Forum -seulement 12 défaites à domicile en 2014-2015, Playoffs inclus- ce qui en fait un candidat redoutable.

 

  • Une Free Agency mitigée 

 

Suite à son échec face aux Golden State Warriors, la franchise ne semble pas avoir appris de ses erreurs ou doit penser secrètement que les blessures de Mike Conley et Tony Allen les ont privé de Finales de Conférence, voire de Finales NBA. Memphis a donc décidé de miser sur la continuité et de partir à nouveau sur les mêmes bases. La preuve avec sa free agency. 

 

C'est loin d'être une surprise mais Memphiss a tout de même réalisé un très joli coup en conservant son franchise player Marc Gasol qui n'a pas cédé aux sirènes du Madison Square Garden. L'espagnol touchera 110 millions sur les cinq prochaines années. C'est une très bonne nouvelle pour ce petit marché qui, à défaut d'attirer la crème de la NBA en son sein, doit compter sur la loyauté de ses meilleurs joueurs pour rester à Memphis. Les Grizzlies pourront donc encore compter sur l'un des meilleurs pivots, si ce n'est le plus complet de la NBA, qui tournait la saison dernière à 17,4 points, 7,8 rebonds, 3,8 passes décisives et 1,6 contre. 

 

Mis à part la re-signature du All-star, les Grizzlies remplacent Kosta Koufos parti aux Kings de Sacramento par Brandan Wright. Originaire de Nashville, l'ailier-fort pose ses valises dans son état natal pour venir compléter la raquette la plus complémentaire et la plus féroce de la NBA. Plus aérien, meilleur finisseur sur pick-and-roll que Kosta Koufos, le nouveau venu vient diversifier la peinture de Memphis. L'expert des Phoenix Suns, Dave King, résume d'ailleurs très bien ce que peut apporter Brandan Wright aux Grizzlies :

 

En 20 minutes par match, il apportera une nouvelle énergie, bloquera quelques shoots et marquera entre 8 et 10 points près du cercle sur des putbacks ou des dunks.

 

Il est vrai qu'avec ses 7 points à 58% au tir, 5 rebonds et 1,2 contre en 20 minutes en 40 matchs aux Suns, Brandan Wright est une bonne pioche pour Memphis. Cependant, sa venue est loin d'être suffisante pour faire passer un cap à la franchise face aux armadas de la Conférence Ouest.

 

Pour compléter son roster déjà défensif, Memphis a attiré dans ses filets l'ennemi public numéro 1 Matt Barnes. Auteur de 10,1 points et 4 rebonds par match la saison dernière, le Californien de 35 ans apporte son expérience, sa dureté et surtout une menace plus crédible que Tony Allen à trois points. Mais est-ce véritablement la recrue nécessaire pour dépoussiérer les schémas offensifs archaïques des Grizzlies ? Peut-il réellement être une plus-value pour l'attaque stagnante de Memphis ? S'il offrira plus d'espace en attaque grâce à la menace de son tir extérieur dans les corners, cet ajout semble encore une fois trop faible pour combler les carences récurrentes de l'équipe qui l'empêchent d'atteindre les Finales NBA.

 

Cette intersaison des Grizzlies de Memphis laisse surtout un goût d'inachevé, un sentiment frustrant qui nous laisse sur notre faim. À cet égard, des pourparlers avaient été engagés pour obtenir des informations sur Danilo Gallinari (Denver Nuggets) et sur Joe Johnson (Brooklyn Nets). Tous deux auraient pu amener une polyvalence offensive et une capacité de scorer qui font cruellement défaut aux Grizzlies. Néanmoins, les discussions ont tourné court car Memphis ne semble pas avoir grand-chose à offrir en contre-partie sans affaiblir son roster. La franchise du Tennessee ne semble surtout pas prête à se séparer d'un des membres de son noyau dur composé de Mike Conley, Tony Allen, Zach Randolph et Marc Gasol. Les Grizzlies se retrouvent donc dans une situation délicate qui pourrait s'avérer critique. Pour l'instant, le front-office joue petits bras et semble se satisfaire de son effectif pour remporter le "Graal". Memphis persiste encore une fois et semble manquer le train de l'évolution en omettant d'ajouter des joueurs qui leur permettraient de franchir un cap décisif. 

 

  • Des Grizzlies en voie d'extinction ?

 

Dans l'inconscient collectif, le grizzli, et de manière générale l'ours, est à la fois un animal féroce mais rassurant pour les enfants, voire attendrissant avec sa démarche pataude. En grossissant les traits, cette analogie correspond de manière saisissante avec la franchise du Tennessee. En effet, les Grizzlies peuvent faire peur lorsqu'ils défendent, jouent dur et se donnent corps et âme. Néanmoins, ils sont patauds à souhait quand il s'agit de dégainer à trois points. Ils se contentent de défendre leur tanière et oublient trop souvent d'attaquer pour faire partie du gratin de la NBA et ne pas être voués à l'oubli.

 

Au sein d'une division Soutwest et d'une Conférence Ouest de plus en plus compétitive, Memphis a bien évidemment son mot à dire. Les Grizzlies sont habitués aux joutes du far-west et vont ainsi être présents durant les playoffs grâce à leur type de jeu si singulier. L'entraîneur Dave Joeger résume encore une fois très bien la situation et annonce la couleur pour la saison prochaine :

 

Les gens savent qu'on est une équipe qui joue dur, mais cette année j'aimerais qu'on devienne presque insupportables. On a ajouté Matt Barnes, on aimerait le mettre à l'aile avec Tony Allen. Si on ajoute Zach Randolph, ce sont trois des joueurs les plus durs de toute la Ligue donc on veut devenir méchants, voire quasi-insupportables.

 

Prenez un Tony Allen, rajoutez du Zach Randolph et un zeste de Matt Barnes, secouez le tout et dégustez ce cocktail détonant. Qu'on se le dise, les Grizzlies répondront présent mais, mis à part les fans inconditionnels de la franchise, qui prévoit une parade dans le Tennessee au mois de juin, synonyme de victoire NBA ?

 

Memphis excelle en défense, ce qui en fait une équipe redoutable. Cependant, les carences offensives semblent trop importantes pour pouvoir prétendre au titre ultime. Pour un contender sérieux, avoir la 20ème attaque de la Ligue avec 98,3 points par match fait tout de même tâche. Qui plus est, shooter à 33,9% à trois points et ainsi être au 22ème rang de toute la NBA n'aide pas à étirer les défenses pour laisser plus de place à leurs deux grizzlies dans la raquette. Bien qu'intéressantes, les recrues de la Free Agency offrent un meilleur banc, mais ne semblent pas pouvoir mettre fin à ce mal endémique qui gangrène des Grizzlies en voie d'extinction. 

 

Face aux armadas des Spurs de San Antonio, des Warriors de Golden State, voire des Los Angeles Clippers, Memphis semble moins bien armé pour s'adjuger le titre de la Conférence Ouest et ainsi jouer les Finales NBA. Les Grizzlies sont-ils prêts à rugir une dernière fois ou le blues s'emparera-t-il de la ville ?